
Journée internationale des travailleurs domestiques
Toujours essentiels, souvent négligés : les travailleurs domestiques en temps de crise
Les travailleurs et travailleuses domestiques fournissent des soins essentiels dans nos foyers, mais leur contribution n'est souvent pas reconnue. Alors que les crises mondiales s'intensifient, cet article réfléchit à l'urgence de valoriser et de protéger le travail domestique, et de faire progresser le travail décent pour tous, conformément à la convention n° 189 de l'OIT.
29 mai 2025
Qu'il s'agisse du changement climatique, des tensions géopolitiques, de la perte d'emploi, de l'augmentation du coût de la vie ou des inégalités croissantes, nous vivons un moment historique sans précédent, souvent accablant, caractérisé par de multiples crises qui s'entrecroisent. Dans ces moments-là, nous passons en mode survie, nous efforçant de sauvegarder et de maintenir ce que nous considérons comme essentiel : nos familles et nos maisons.
En d'autres termes, nous prenons soin.
Le travail des soins est l'essence même de notre humanité commune. Il nourrit nos sociétés et permet à nos économies de fonctionner. En temps de crise, c'est d'une société bienveillante dont nous avons le plus besoin.
Si la plupart des soins ne sont pas rémunérés, une part importante est fournie par des travailleurs de soins rémunérés, dont beaucoup sont des travailleurs domestiques. Et les travailleurs domestiques, comme beaucoup de travailleurs de soins, continuent régulièrement à travailler dans des situations d'urgence, s'occupant d'enfants, de personnes âgées et de personnes handicapées, souvent au détriment de leur propre sécurité et de leur bien-être.
Les travailleurs domestiques sont ceux et celles qui fournissent des services de soins directs et indirects dans ou pour des ménages privés. L'OIT estime à 75,6 millions le nombre de travailleurs domestiques âgés de plus de 15 ans dans le monde, mais leur contribution n'est souvent ni reconnue ni protégée.
Il y a quatorze ans, le 16 juin 2011, l'OIT a adopté la convention n° 189 sur les travailleuses et travailleurs domestiques, qui reconnaît l'importante contribution des travailleurs domestiques à l'économie mondiale, en leur offrant des possibilités d'emploi rémunéré, en leur permettant de s'occuper d'autres personnes et en assurant des transferts de revenus à l'intérieur des pays et entre eux. La Convention invite les États membres qui l'ont ratifiée à garantir un travail décent aux travailleurs domestiques, sur un pied d'égalité avec les autres travailleurs, tant en droit qu'en pratique. La résolution de l'OIT sur le travail décent et l'économie des soins a réaffirmé en 2024 que les travailleurs domestiques sont des prestataires de soins et qu'ils font partie des travailleurs les moins protégés de la main-d'œuvre des soins.
Tout porte à croire que la main-d'œuvre domestique va continuer à croître. On estime que d'ici 2030, 2,3 milliards de personnes auront besoin de services de soins, et de nombreux pays sont déjà confrontés à d'importantes pénuries de main-d'œuvre en raison de l'âge ou du vieillissement de leurs sociétés. Les travailleurs domestiques représentent au minimum 25 % des travailleurs du secteur des soins, et bien plus dans certains contextes. Face à cette crise des soins, les pays se tournent de plus en plus vers les travailleurs domestiques, souvent des travailleurs domestiques migrants, pour répondre aux besoins en matière de soins.
Mais dans quelles conditions ? Le travail domestique reste sous-évalué, sous-payé et non réglementé, 81 % des travailleurs étant employés de manière informelle, sans protection juridique et sociale, subissant de longues heures de travail, de faibles salaires et un accès limité aux mesures de sécurité et de santé au travail. Les travailleurs domestiques sont également exposés à diverses formes d'abus, de violence et de harcèlement, et ne sont souvent pas représentés dans le dialogue social, ce qui les empêche de plaider en faveur de meilleures conditions.
Bien que les familles préfèrent souvent les soins à domicile plutôt qu'en institution, les investissements dans l'économie des soins ciblent rarement les travailleurs domestiques. Et pendant les crises, les travailleurs domestiques se sont souvent retrouvés sans emploi, sans logement ou sans protection sociale - sans les soins dont ils ont besoin pour vivre. Il est paradoxal d'appeler à l'investissement dans les soins tout en restant silencieux sur ces inégalités dans le secteur du travail domestique dominé par les femmes.
Depuis l'adoption de la convention (n° 189) de l'OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011, de nombreux pays ont étendu leur législation du travail afin de mieux protéger les travailleuses et travailleurs domestiques et ont intégré ces derniers dans leurs systèmes de sécurité sociale. Au cours des 14 dernières années, l'OIT a aidé les mandants de plus de 60 pays à faire respecter les droits et le bien-être des travailleurs domestiques. Malgré ces progrès, des lacunes importantes subsistent.
Il y a des mesures que nous pouvons prendre aujourd'hui pour faire du travail décent une réalité pour les travailleurs domestiques. Ce faisant, nous pouvons commencer à construire une société qui s'articule autour des soins, y compris le travail domestique, en tant que moteur économique essentiel et en tant que condition préalable à une résilience partagée.
Alors que le monde se remet d'une crise, quelle qu'elle soit, l'investissement dans le travail domestique et l'économie des soins contribuera à construire des sociétés plus résilientes, plus justes et plus équitables du point de vue du genre. Les gouvernements peuvent veiller à ce que les travailleurs domestiques soient reconnus dans les politiques de soins en tant que prestataires de soins, tout en s'assurant qu'ils ont accès au travail, à la protection sociale et aux services de soins qui répondent à leurs propres besoins de soins. Les organisations représentatives des travailleurs, et les organisations représentatives de travailleurs domestiques, jouent un rôle essentiel en faisant entendre la voix du secteur dans le dialogue social. Les employeurs peuvent s'organiser pour refléter leur intérêt à accéder à des services de soins de qualité, abordables, adéquats et accessibles, notamment en offrant des conditions de travail décentes au sein de leur foyer.
Et chacun d'entre nous peut également apporter sa contribution. Comme les travailleurs domestiques ont pris soin de nos ménages et de nos familles, il est temps pour nous de prendre soin des travailleurs domestiques qui s'occupent de nous, même en temps de crise. Pour célébrer les travailleurs domestiques, l'OIT a lancé un défi sur les médias sociaux invitant le personnel et les mandants à se joindre à l'appel en faveur du travail décent pour les travailleurs domestiques.